• Et maintenant,
    Il y a quelqu’un assis là
    sur une chaise …
    Un personnage hors norme, venu découvrir l’enfer de Dante avec ses pals, ses rôtissoires et ses ruisseaux de feu.
    Comme s’il avait lu La Divine Comédie
    Comme s’il attendait Virgile assis là sur sa chaise,
    Comme si l’enfer allait s’ouvrir devant lui,
    nous dire enfin la raison de la peur et du désir des hommes
    Et si Virgile n’arrivait pas
    Et s’il fallait y aller tout seul, sans guide
    Et si l’on découvrait que l’enfer
    n’était plus ce qu’il était ?

    *photo F.Beloncle

    Ce spectacle est le voyage d’un être multiple, d’une créature rougeoyante qui distille des paroles incisives…
    Un acte théâtral aux accents clownesques, pour désobéir.

    Le goût de la désobéissance

    On peut voir dans le conformisme, une figure de l’enfer ordinaire. C’est contre son « insinueuse » influence que s’élèvent les textes qui m’ont séduite. Des textes qui ont le goût de la désobéissance. Ce sont eux qui m’ont menée à concevoir Dans le rouge.

    Comment faire pour les traiter sans les dénaturer, sans pour autant se prendre au sérieux, sans obéir à la loi du genre ?

    Pour cela il me fallait les découvrir en même temps que les spectateurs : sans préjugés, comme pour la première fois, je pensais alors au clown dont le code de jeu permet cette expérience en direct. Des improvisations surgit cette silhouette rouge, une enveloppe plus qu’un être, mais sans nez rouge, une bulle, un matériau libre capable d’ aller à l’abordage de textes qui n’avaient pas vocation de se montrer sur scène.

    À l’origine, donc, une forme hybride, mélange d’écriture improvisée et de textes existants et peu à peu, le fil conducteur du spectacle, un voyage en enfer. Il m’a servi de piste pour explorer notre époque.

    Venu pour voir l’Enfer de Dante — rempli de pâles, de rôtissoires, de ruisseaux de feu — On découvre tout autre chose… l’enfer d’aujourd’hui… l’enfer du décor…

    Dans cet enfer, comme Dante, on découvre bien les luxurieux, les peureux, les puissants. Mais, avec le temps, ils ont plutôt changé d’allure…

    Lucie Valon

    « Un personnage hors norme, venu découvrir l’enfer de Dante avec ses pals, ses rôtissoires et ses ruisseaux de feu, se confronte à l’enfer d’aujourd’hui… Voyage d’un être multiple, d’une créature rougeoyante qui distille des paroles incisives…
     Un visage qui met en déroute. Une rigueur forte et nécessaire. Une écriture acérée, drôle et grave à la fois, une traversée jubilatoire
    que j’étais fière et heureuse d’accompagner.»

    Julie Brochen

    « C’était au Mans je crois, et en marchant, cela est sûr, et nous sortions d’une représentation et Lucie m’a dit qu’elle travaillait sur son clown, je ne comprenais pas ce que cela voulait dire, avoir son clown, alors je suis allé voir Lucie et soudain tout s’est éclairci, aujourd’hui je sais, et comme on disait dans mon village et avec beaucoup de respect : Lucie Valon, c’est quelqu’un! Pour moi, c’est beaucoup de monde à elle toute seule. »

    Joël Jouanneau

    « Au milieu du chemin de notre vie, je me retrouvai par une forêt obscure car la voie droite

    était perdue. Ah dire ce qu’elle était est chose dure cette forêt féroce et âpre et forte qui

    ranime la peur dans la pensée ! Elle est si amère que mort l’est à peine plus ;                          

    mais pour parler du bien que j’y trouvai, je dirai des autres choses que j’y ai vues ».

    Dante, La Divine Comédie, L’Enfer, Chant I, vers 1-9, traduction Jacqueline Risset, Paris, GF, 1985.


  • *photos Franck Beloncle
  • Théâtre Bains Douches – Volcan
    du 8 au 13 Février 2011

    Théâtre du Pavé – Toulouse
    du 20 au 29 jan 2011

    Festival d’Alloue
    La maison du Comédien

    27 juin 2009

    Théâtre de l’Aquarium
    du 23 janvier au 18 février 2007

    Ateliers Berthier- Théâtre National de l’Odéon
    10, 11 juin 2006

    Festival Découvertes – Théâtre de l’Aquarium
    28 février au 5 mars 2006

    CCAS 2008-2009



  • L’Humanité
    12 février 2007

    L’enfer, c’est le nôtre
    découverte. Dans le rouge est un spectacle dérangeant et nécessaire, porté par un étrange ménestrel, Lucie Valon.

    C’est un clown comme nul autre : tout de différents rouges vêtu, du chapeau aux chaussons. Le visage blanc, mais pas de nez rouge, Lucie Valon s’en affublera seulement à la fin du spectacle Dans le rouge, comme si, somme toute, il valait mieux en rire. Celle qui nous apparaît aussi tel un étrange ménestrel, inclassable au possible par sa manière de mitonner ensemble pitrerie amère ou jubilatoire, présence appuyée irriguée de bouffées de rage et repli aux contours autistiques… Cette clown-là, donc, qui en rappelle une autre, la douée Catherine Germain, voulait aller en enfer : le plus évident, le plus furieux qui soit, celui de Dante (parfois dit et chanté) où se dressent fourches et pals près d’une rôtissoire chauffant à plein. Cette présence rougeoyante se pâmait à l’idée de ce lieu où les pires sévices attendaient au tournant les plus aigus des vices… La peur ajoutait au régal, mais las… Quelle déconvenue ! Tout en bas, point de flammes. Non, juste une mollesse à l’unisson, du factice à foison et un consensus laissant abasourdi. Voilà pour l’enfer, rien d’autre qu’un très contemporain conformisme. L’enfer, c’est le nôtre, ici, nous dit de manière diffuse Lucie Valon : soit, déclinée par des journaux épars au sol, une époque, un espace abruti.

    Cette figure hors normes y rôde et le fuit à la fois dans un rond de lumière. Elle l’électrise de sa couleur pourpre, vitale. Lucie Valon a la critique grinçante, sinueuse, lente, impitoyable ; elle s’approche, ne nous lâche pas des yeux et semble dire, les manipulant : « c’est vous », ce Ken non membré et cette Barbie décérébrée échangeant des formules de magazine sans âme sur le bien-être immédiat, le besoin de se sentir soi. Puis voilà Lucie Valon entraîneur de basket tonique et magnifique, assénant, avec un fort accent méridional, à chaque joueur l’attitude, le mental à tenir ou à rejeter. La balle nous est au propre renvoyée. On rit de voir ainsi le sport se prendre au sérieux, et l’on se désole un peu de voir que les concepts, la réflexion qu’il brandit a déserté d’autres sphères de notre temps.

    Ailleurs, l’univers bourré de références de Lucie Valon se pénètre avec moins de fluidité. Son texte a puisé à des auteurs tels que Dante, d’une part, mais aussi Mandelstam (l’Entretien sur Dante), Raoul Vaneigem (Lettre de Staline à ses enfants réconciliés, Staline dont Lucie Valon prendra les traits). Ne cédant rien à la facilité, la singularité du spectacle de Lucie Valon, qui a pour directeur artistique Christophe Giordano, est d’abord exigence. Ce clown au fort tempérament laissera en nous des stigmates sur le plan des sensations. Son extrême liberté de mouvements et de paroles, son timbre mouvant, dissonant, son rire exacerbé imitant les nôtres, grossiers et déplacés, cette mine qui s’affole, s’égare et soudain s’aiguise pour n’épargner personne, tout cela souvent interroge, met mal à l’aise. Pour l’enfer mythique, certes, on repassera. Mais pour sûr l’important Dans le rouge allume des signaux nécessaires.

    Aude Brédy

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