Le clown

« L’homme a forgé les instruments pour se tuer. Cette réalité dépasse largement le cadre de la tragédie, seule la comédie peut en rendre compte. » Durrenmatt

C’est un code de jeu mutant, nos explorations nous entrainent bien loin du clown de cirque traditionnel avec ses grandes chaussures et son nez à fausses larmes.
Il est vrai que nous vivons – on nous le rabache suffisamment – dans une époque où tout va vite, une époque de ‘zapping’. Impossible de faire comme si cela n’existait pas. Comme le clown, nous essayons d’adhérer aux propositions qui nous sont données afin de pouvoir les détourner , le code clownesque est l’art de la rupture, lui aussi à sa façon pratique le zapping.
Il englobe un registre de jeu extrêmement large qui va de la distanciation à l’incarnation la plus poussée : il peut se jouer de sa propre image et l’instant d’après nous interpréter la tirade de richard III de Shakespeare.
Le clown imite, détourne et recycle sans complexe, Il est une matière à jouer. Pour se faire le travail doit toujours commencer par un remise à zéro du jeu. C’est de là dont nous partirons dans ce spectacle ; d’ acteurs qui essaient de rentrer comme on dit dans la peau de leur personnage de traders. Après plusieures tentatives il seront obligés de mettre des nez rouges pour y arriver et trouver la démesure nécessaire. Mais qui dit démesure dit cruauté et débordements. Il est dangeureux de laisser plusieurs clowns ensemble sur un plateau, la lutte sera rude. Une fois qu’il se seront mangés entre eux…il ne restera que le public pour assouvir leur appétit.
Nos projets sont construits sur la base d’une écriture de plateau. L’improvisation nous permet de construire sur le surgissement de l’imprévisible. A partir de coupures de journaux, d’événements de l’actualité, de morceaux choisis de textes, les improvistions seront poussées mais gardées dans leur étrangeté. A l’instar du registre du jeu clownesque nous privilégions la pratique du montage et du collage ; de ce qui vient a brûle-pourpoint sans crier gare.
Nos clowns n’ont pas de noms, pas d’histoires, pas de costumes attitrés, ou de maquillage identifiable : Il sont traversés par des personnages, des figures archétypales de notre société mais garderont comme caractéristique leurs obsessions et leurs comportements subversif.

L’insouciance effrontée du clown nous permet de redécouvrir l’insolence. On le sait, dans les années 20 ce code de jeu était très prisé et Brecht l’a utilisé pour donner naissance à ce qu’il appellera la distanciation. C’est cette mise à distance, qui peut faire apparaître l’inconscient collectif, la production de normes et de conventions, et de sonder cette société qui par ce biais se donne à voir…